L'Histoire
Depuis le moyen âge jusqu’au XXIème siècle, le château du Lude est le témoin des épopées militaires et politiques qui ont fait la France.
Une forteresse imprenable ?
Situé aux marches de l’Anjou, dans la vallée du Loir, non loin du Maine et de la Touraine, Le Lude occupe dès le IXème siècle un site stratégique, hérité de l’époque romaine.
La cité ludoise, à l’abri de ses remparts rudimentaires, subit les attaques répétées des Normands qui envahissent la région. Elle se dote progressivement d’une forteresse en pierre et maçonnerie, dont la construction s’étalera du XIIIème au XVème siècle et qui verra se succéder des personnages hauts en couleur, tels Foulque Nerra, Jean de Brienne, fils du roi de Jérusalem, les Seigneurs de Beaumont et de Vendôme.
Les fortifications se révèlent efficaces, en particulier lors de la Guerre de Cent ans en 1370, à l’occasion de la bataille de Pontvallain. À deux reprises, le capitaine Guillaume de Méron repousse les attaques anglaises conduites par Robert Knolles qui occupe la ville avec 10 000 cavaliers.
Un demi siècle plus tard toutefois, le Comte de Warwick, au terme de la conquête du Maine, s’empare du Lude en 1425. Il y restera deux ans avec une garnison de 1200 hommes, pour être finalement délogé par les compagnons de Jeanne d’Arc : Beaumanoir, Ambroise de Loré et Gilles de Rais, le légendaire Barbe Bleue.
L’Anjou fait peu après son entrée dans la Renaissance, avec le règne pacifique du « bon Roi René ».
Les Daillon, une famille puissante au service des rois de France.
Pour le Lude commence alors une nouvelle destinée, intimement liée à la montée en puissance de la famille Daillon du Poitou.
Jehan de Daillon fait l’acquisition du château et des terres du Lude en 1457. Sept membres de la famille s’y succèderont de père en fils, jusqu’en 1685. Tous occuperont de hautes charges à la cour et aux armées.
Le Lude, s’il n’est pas un château royal, n’en demeure pas moins un lieu proche du pouvoir. La stupéfiante métamorphose de la sévère forteresse en un brillant palais traduit l’irrésistible ascension d’une famille au service des rois de France.
Jehan de Daillon est Chambellan du roi Louis XI, Gouverneur du Poitou, capitaine de cent lances et général des armées de Roussillon et Picardie.
Son fils Jacques se distingue aux côtés de François Ier, aux batailles de Fontarabie et de Pavie. Conséquence indirecte de l’esprit de conquête de François Ier, la demeure angevine se met au goût de la Renaissance venue d’Italie.
Ses successeurs seront tour à tour Gouverneur du Poitou, Sénéchal d’Anjou, lieutenant général de Guyenne..
Henri, dernier du nom, est élevé à la cour. Il accède aux charges les plus brillantes : Lieutenant général des armées, Gouverneur de Versailles, Grand Maître de l’artillerie…
A la cour du roi soleil, son esprit vivace et ses réparties sont réputés. En 1675, sommet de la gloire, la terre du Lude est érigée par Louis XIV en Duché Pairie.
Joseph Julien Duvelaer, le nabab venu d’Orient
Par héritage, le Lude échoit au Ducs de Roquelaure puis aux Ducs de Rohan qui se séparent progressivement de leurs domaines angevins.
Avec l’arrivée d’un armateur malouin, issu d’une famille de corsaires hollandais, Le Lude connaît un nouveau destin. Joseph Julien Duvelaër dirige le comptoir français de Canton pour la Compagnie des Indes. Il se porte acquéreur du château du Lude où il se retire avec son épouse chinoise.
Distingué par Louis XV, Joseph Julien Duvelaër sera fait Comte du Lude.
Mais ce brillant armateur meurt sans descendance, laissant ses biens à sa nièce, la Marquise de La Vieuville. Depuis 1785, le Lude est resté dans les mains de la même famille jusqu’à nos jours.
Madame de La Vieuville laisse son époux en Bretagne où il occupe la charge de Gouverneur du Parlement. Tandis que celui-ci périt sur l’échafaud en 1792, à l’âge de 84 ans, son épouse choisit de rester habiter le château durant la tourmente révolutionnaire. Elle sauvera le domaine, avec l’aide des habitants du Lude.
Le château des Talhouët-Roy
La fille de la Marquise de La Vieuville épouse Louis Céleste de Talhouët.
Une nouvelle famille, engagée dans la vie publique, s’unit dès lors aux destinées du Lude durant 150 ans.
D’origine bretonne, Louis Céleste de Talhouët devient un des premiers Présidents du Conseil général de la Sarthe, tandis que son épouse est nommée dame du palais des impératrices Joséphine et Marie-Louise.
Leur fils Frédéric de Talhouët gagne ses galons de Colonel sous l’Empire, et à la suite de Napoléon participe aux grandes batailles, d’Iena à la Moscowa. Après avoir quitté l’armée, Frédéric de Talhouët s’établit au Lude et s’engage dans l’agriculture et la politique. Il devient à son tour Président du Conseil Général de la Sarthe.
Son épouse Alexandrine est la fille du Comte Antoine Roy, un brillant avocat et industriel avant l’heure. Père de deux filles, il souhaite que l’ainée conserve le patronyme familial, d’autant plus qu’une grande partie de sa succession est confiée au château du Lude. Sa seconde fille, Elisa, Comtesse de la Riboisière, lèguera sa fortune à la fondation de l’hôpital qui porte son nom.
Auguste, Marquis de Talhouët-Roy, succède à son père dans la même voie. Sa vocation politique le conduira au Ministère des travaux publics sous le second Empire.
Avec son épouse Léonie Honnorez, héritière d’un industriel belge, il entreprend de profondes transformations de son château du Lude.
Au XXème siècle, Le Lude, vivant témoignage de l’art de vivre à la française.
Leur fils René de Talhouët-Roy leur succède, tant sur le plan de la politique régionale que dans la conduite du domaine de Lude. Maire du Lude pendant 56 ans, il préfère sa demeure sarthoise à la vie parisienne, comme bon nombre de ses prédécesseurs. Pendant les deux guerres mondiales, Le Lude devient le refuge de toute sa famille.
Le Marquis de Talhouët Roy fait classer le château Monument historique en 1927. Passionné de vénerie, il créé l’équipage Talhouët qui chasse le chevreuil sur ses terres.
A sa mort en 1948, le château devient la propriété de son petit-fils, le Comte René de Nicolaÿ. Suite à son décès prématuré en 1954, son épouse, née Princesse Pia d’Orléans Bragance, assume la charge du domaine. Elle donne une nouvelle impulsion au Lude en créant le spectacle Son et Lumière, qui met en scène l’histoire du château avec le concours de 350 figurants, tous habitants du Lude. Pendant près de 40 ans, ce spectacle, premier du genre, accueillera plus de 5 000 000 de spectateurs.
Aujourd’hui, le château appartient à son fils Louis-Jean de Nicolaÿ, sénateur de la Sarthe et Maire du Lude. Avec son épouse Barbara et leurs quatre enfants, ils veillent à la conservation et l’animation du château et de ses jardins.